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Intérieur jour.

11 septembre 2013

Bruit de tôle froissée, crissement de pneus, et

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Bruit de tôle froissée, crissement de pneus, et puis plus rien. L'impact a été redoutable, le choc effrayant. Sérieux, ça ne pouvait pas arriver il y a six mois, lorsque j'étais au fond du trou ? Ou dans quelques semaines, si j'avais tout reperdu ? Non, il a fallu que ça arrive à cet instant précis. Putain, mais il ne réfléchit jamais Dieu ? Pourquoi t'emmerdes pas les gens qui n'en ont rien à foutre de leur existence et qui n'hésitent pas à la balancer sans scrupules dans un ravin ? 

Le souvenir s'épaissit déjà dans le peu de cerveau qui me reste. Je me rappelle d'une voiture en face qui double, d'un cri qui clame "FREINE", d'un coup de volant sur la droite, et plus rien. Je les entends déjà les sirènes, les pompiers en uniforme qui tentent d'extraire nos chairs de ce foutu bourbier, mais c'est déjà trop tard les gars, on va tous crever sur cette départementale où on n'a aucune attache. Nos parents se taperont quatre-vingt-dix bornes et viendront mettre des chrysanthèmes, peut-être qu'on aura droit à une stèle avec nos plus beaux portraits dessus et un beau jour, la Sécurité Routière viendra mettre quatre silhouettes noires géantes au lieu même où on aura agoniser, comme ça, les élèves de l'école primaire du village en face viendront se recueillir et la maîtresse leur fera ce magnifique sermon : "Vous voyez, il faut que cela cesse ! Il ne faut pas que cela vous arrive ! Ne buvez jamais avant de prendre le volant, vous avez compris ? JAMAIS !".

Mais on n'avait pas bu une goutte d'alcool, espèce de connasse, on en aurait d'ailleurs presque regretté d'être aussi sobre puiqu'on était conscient de tout, d'absolument de tout. Manu qui était à côté de moi avait le pare-brise dans la gueule, elle-même ensanglantée, et moi j'avais le souffle court mais j'ai quand même réussi à murmurer une bonne quinzaine de fois "Il est mort, il est mort." Tu vois, chère maîtresse, inculte au service de l'Education Nationale, si t'avais été à côté de moi à ce moment-là, tu aurais su que je n'avais pas porté un seul verre de rose à mes lèvres, ce qui vallait également pour mes trois autres camarades de route. On était des morts-vivants prisionniers du bitume.

J'ai pas vu défiler ma vie, j'ai pas vu le tunnel avec la lumière blanche tout au bout. Je me suis juste rappelée de cette séquence des Choses de la Vie de Claude Sautet où Michel Piccoli a un terrible accident de voiture lui aussi. Je me rappellerai toujours du visage de Piccoli faire les quatre recoins de l'écran de télévision. Sa voiture faisait des tonneaux et on vivait ce tourbillon de la mort avec lui. L'accident avait lieu aussi au fin fond d'une campagne où tout était plat et insipide, où on se demandait même s'il existait de la vie tellement il n'y avait rien. Je nous ai alors vus faire des tonneaux tous les quatre, Clara à l'arrière qui s'accrochait aux parois de la bagnole, François qui mettait les mains sur ses yeux, Manu cramponné au volant et moi, hurlant, gesticulant comme un pantin bientôt désarticulé. Ca n'a duré que deux secondes et demi mais le temps s'est alors inexorablement étendu, transformant ainsi les secondes en minutes, puis en heures, et enfin, en éternité.

On était tous morts, mais on avait le sourire aux lèvres.

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8 août 2013

Oubliez-moi, mais OUBLIEZ-MOI. Je n'ai plus envie

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Oubliez-moi, mais OUBLIEZ-MOI. Je n'ai plus envie de voir vos gueules de cons. Peut-être que je vais ne plus le penser demain, peut-être même que je vais regretter tout ça mais pour l'instant, oubliez-moi. Et puis, faut dire que vous avez voulu m'oublier. Vous l'avez voulu, donc au fond, vous n'avez que ce que vous méritez. Je veux juste souffler, respirer un bon coup, sentir pleinement l'air dans mes poumons, et puis le recracher à vide. Et répéter l'opération deux, dix, quinze fois de suite, jusqu'à parvenir à l'écoeurement. 
J'ai pas choisi de ressentir tout ça, ce sentiment de trop-plein, et puis ce dégoût, et puis cette lassitude. Et malgré le désespoir, j'ai une furieuse envie de vivre.

De l'autre côté de la mer, on lui tend les bras. La jeune fille est là, elle sourit face à l'océan. De son sourire naît une étrange atmostphère, de celle palpable dans l'air chaud de l'été. Elle possède une longue robe blanche quasi transparente. On entrevoit ses formes voluptueuses. Elle marche lentement dans l'eau et penche délicatement la tête vers son épaule, comme si elle voulait caresser le soleil. Les bras se lèvent doucement et entourent son corps majestueux, superbe cygne des mers.

Un peu plus loin, un homme chauve se rince l'oeil en regardant la belle. Assis sur le sable, il est accompagné d'un petit chien à l'air imperturbable. L'animal observe l'amusement de son maître. Comme les hommes sont faibles face à la femme, doit-il se dire. 

Le garçonnet hurle. Un être visqueux de couleur violacée vient de le piquer à la jambe. C'est une méduse, lui hurle une grosse brune qui doit certainement être sa mère. Sors de l'eau, sors de l'eau, continue-t-elle de hurler, toujours avachie sur sa serviette délavée. Mais lève-toi pauvre conne, ton fils est en train de hurler à la mort. Même si ce n'est rien, montre-lui qu'à tes yeux, c'est beaucoup.

La naïade continue le ballet aquatique, l'homme dégarni pointe alors son doigt en sa direction et semble vouloir la caresser au loin, le tout sous les cris de l'enfant et de la mère qui ne sert à rien. Je suis sûre que la fille a buté quelqu'un, un garçon sûrement, et maintenant, elle danse dans l'eau pour fêter sa macabre victoire. Le chauve n'est qu'un pauvre vicelard qui se délecte tous les jours à la même heure des nanas sur la plage. Ensuite, il doit rentrer chez lui, bien content d'avoir assisté gratuitement à un aussi joli spectacle qu'il peut simplement voir et pas toucher. Le garçon a juste une mère qui n'en a rien à foutre de sa gueule, probablement qu'elle l'a fait dans le dos du père d'ailleurs, et que lassé de l'hystérie de sa bonne femme, il s'est cassé avec une fille mieux foutue qu'elle. Avec une telle figure maternelle, l'enfant est devenu chieur car il a pris de suite conscience de l'ascendant qu'il avait sur elle. Seul le chien sera épargné.

La mer est brûlante, la plage est bruyante. Paradoxalement, c'est apaisant.

Ne m'en voulez pas, pauvres cons. J'avais juste besoin de voir la mer très longtemps.

2 août 2013

J'aime pas l'odeur des maisons de retraite parce

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J'aime pas l'odeur des maisons de retraite parce que ça sent la mort. Ca vous prend à la gorge et ça ne vous lâche plus après. Un savant mélange de produit javelisant et de médicaments censés soulager les pires douleurs des grabatères. Quand on pénètre l'enceinte, on se la prend toujours de plein fouet. Tu peux essayer de te nettoyer tant que tu veux, tu peux même récurer ta peau jusqu'à la faire saigner, l'odeur ne partira pas, elle s'imprègne, se colle, fusionne avec ton corps et tu la subis des heures durant. Elle te nargue en se baladant lentement, le genre de douleur qui prend un malin plaisir à parcourir cinq centimètres en deux heures, comme pour mieux prolonger le supplice. Après avoir tapissé tous tes vêtements de son odeur abjecte, elle parcourt tes narines, te pique les yeux, puis s'installe dans ta bouche. L'odorat et la mémoire se confondent. Mon nez refuse cette odeur parce qu'il sait pertinemment ce que ça signifie. 

Le parfum de la mort.

Elle était là, sur son fauteuil. Le corps était recroquevillé sur le fer, courbé par l'environnement. Autrefois danseuse, aujourd'hui éteinte. Le mouvement ne répond plus, de même que les sens qui semblent être absents. Elle n'est pas incommodée par l'odeur, elle ne semble pas avoir conscience que la mort rôde autour de son siège. Pourtant, le parfum était bel et bien là, plus présent que jamais. J'ai eu un haut-le-coeur, moi aussi je me suis courbée, puis j'ai tourné les talons, j'ai ouvert la porte et je me suis barrée en courant. Dans les couloirs, personne, sauf une vieille qui hurlait à la mort dans la chambre voisine. Elle ne le savait pas, la pauvre malheureuse, mais j'aurais voulu lui dire qu'elle arrête de provoquer la mort car elle était tout près. La vieille criait le prénom de son fils, mort depuis des années dans un accident de voiture, mais elle ne s'en souvenait plus. Quand on atteint un certain âge, l'odorat et la mémoire ne se confondent plus. Ils se barrent, ils sont lâches. L'odorat et la mémoire sont seulement là pour faire souffrir les plus jeunes, pour qu'ils n'oublient pas ce qui les attend à la fin de leur vie.

Je suis malgré tout revenue dans sa chambre, en prenant soin de mettre mon foulard sur mon nez. Subterfuge de pacotille, j'essayais de vaincre le parfum de la mort avec celui de mon bout de tissu. La mort sentait désormais la lessive et l'adoucissant. 

"C'est toi, a mo figliulina ?"

Son corps n'était plus qu'une antiquité mais la voix était pourtant celle d'une petite fille, douce, un brin plaintive. Sa voix n'avait pas subi l'érosion du temps. Autrefois majestueuse, aujourd'hui contrainte. J'avais envie de prendre sa main dans la mienne mais je ne pouvais pas. L'odeur était de plus en plus prégnante dans la pièce. D'un coup, elle a tapissé tous les murs de la chambre d'une couleur entre le marron et le gris. Dégoûtante.

Puis, une brume de plus en plus opaque a commencé à filtrer de part et d'autre et nous avons toutes deux disparu dans la fumée pendant quelques secondes. Le parfum de la mort se personnifiait, il prenait possession du lieu et plus rien ne semblait l'arrêter. J'essayais de me réfugier mais rien à faire, rien à faire, elle semblait vouloir triompher de son horreur. Je me suis mise à hurler mais l'odeur entrait encore plus facilement dans ma gorge. La nausée fut très violente. Je me débattais dans le vide, mes bras bougeaient dans tous les sens et se battaient contre une force invisible. La lutte était sans précédent mais je connaissais déjà le nom du gagnant. J'ai essayé d'ouvrir la fenêtre mais je me suis heurtée à son fauteuil, j'ai manqué de la faire tomber, je me suis excusée trois fois de suite, puis j'ai senti la poignet de la fenêtre, alors j'ai tourné mais impossible d'ouvrir. La fenêtre était condamnée, nous aussi.

Je me suis effondrée. Je tenais toujours la poignet dans mes mains. Son fauteuil était à quelques centimètres de mon corps, suspendu dans le vide comme un vulgaire rôti. Je me suis soudain rappelée que j'avais oublié de lui répondre. Oui, c'était bien moi, sa petite-fille. Soudain, j'ai entendu la porte d'entrée s'ouvrir. Une infirmière venait d'entrer brusquement dans la pièce. Interdite face à ce chaos, elle a demandé quelques secondes plus tard ce qu'il s'était passé.

"L'odeur, lui ai-je répondu. Je ne supporte pas cette odeur."

1 juillet 2013

Le mec est monté à Trocadero, Troca pour les

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Le mec est monté à Trocadero, Troca pour les intimes, même si on n'a jamais été très intimes, cette station et moi. Alors, on ne va pas user de familiarité illusoire, ça serait hypocrite, un peu comme si je te parlais d'un simple collègue comme d'un très bon ami.

Trocadéro, c'est la station où tu descends jamais. Sérieux, qui va à Trocadéro pour boire un coup ? Qui habite à Trocadéro ? Personne, en tout cas, pas le commun des mortels. Généralisons l'ensemble de la populace qui emprunte chaque jour les rames bondées de la ligne 9. Je crois que si l'Enfer avait dû se loger quelque part, il l'aurait fait dans la 9. Tu peux crever dans la 9, littéralement, piétiné, étouffé, ou les deux, par la marée humaine. T'es digne de faire Koh Lanta quand tu te tapes le trajet Porte de St Cloud / République, un héros des villes en puissance qui ne demande qu'à montrer sa grandeur sur une île déserte.

Le mec, donc, est monté à Trocadéro. Propre sur lui, vêtu d'un petit costume foncé avec de fines rayures grises. Le crâne dégarni, un peu rouge, mais qui présentait plutôt bien. Sur le coup, je me suis dit qu'il avait très chaud, après j'ai pensé qu'il avait peut-être dû forcer un peu trop sur le vin rouge. En pleine journée et en prenant la 9 après, ce n'était très pas malin. Bizarrement, la rame était plutôt vide. Il s'est assis sur le strapontin en face de moi. Il avait un sac à ses pieds, le genre de sac qui détonait avec sa tenue qui se voulait chic. Le sac était rouge. C'était peut-être le sac de sport qu'il devait apporter à son petit-fils. Il se dépêchait de traverser tout Paname pour le lui apporter avant qu'il ne commence sa piscine. Et puis non, cette hypothèse était absurde, le gamin n'avait qu'à penser à ses affaires de sport, il avait bien pensé à prendre son iPhone, hein, je suppose. 

Puis, le mec s'est penché et a ouvert le sac qui était à ses pieds. Dedans, du pain emballé à la va-vite, un morceau de fromage, du jambon, une bouteille de jus de fruits. Ce n'était pas des courses achetés au Franprix, c'était des provisions trouvées et regroupées avec précaution dans son sac de sport rouge. Des trésors, des victuailles éphémères qu'on s'empresse de cacher, de peur qu'on ne nous les dérobe. C'était donc pour ça, ce foutu sac rouge. C'était un subterfuge destiné à me faire croire qu'il avait un petit-fils qui avait piscine dans moins de quarante minutes à République. Mais il n'y avait pas de petit-fils, pas plus qu'il ne comptait descendre à République. Le mec était parti pour un voyage qui le dépassait. Bientôt, plus vite qu'il ne l'aurait voulu, il allait arriver au terminus et il se demanderait quoi faire. Repartir dans le sens inverse, c'était envisageable, oui. On peut toujours reprendre la trajectoire de son chemin, mais moins celle sur son existence. Ces provisions dans ce sac, ça signifiait que tout était là désormais, que toute sa vie était résumée à un bout de pain rassis et un morceau de fromage sans saveur. Il y tenait comme à la prunelle de ses yeux. 

J'ai croisé son regard. Il s'empressait de mettre de l'ordre dans son sac, comme s'il y avait un rangement scrupuleux à respecter, comme s'il fallait que de ce capharaüm émerge un ordre, celui de sa dignité. Personne ne pourrait lui voler son sac, il y aurait laissé sa vie s'il avait fallu se battre pour le conserver. Dans son regard, j'ai vu un mélange de gêne et de rébellion, un côté farouche qui ne céderait pourtant jamais devant la honte. Il savait que j'avais compris. C'était notre petit secret à tous les deux.

Il portait la douleur comme on portait une arme. Il la maniait avec précaution car il savait, depuis toutes ces années, qu'on ne la donnait pas à n'importe qui. J'ai alors détourné mon regard quelques secondes et j'ai regardé le mur de briques blanches à ma gauche. Quand mon regard est revenu vers lui, il était descendu.

J'étais arrivée au terminus. 

15 juin 2013

Tout à l'heure, lorsque j'étais dans le métro, un

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Tout à l'heure, lorsque j'étais dans le métro, un homme et une femme sont montés dans ma rame. Ils avaient mon âge, leur look était légèrement baba cool sans être totalement roots. Ils partageaient la barre de métro mais ne se regardaient pas. Il essayait de plonger son regard dans celui de la jeune fille mais il n'y parvenait pas. Elle ne fuyait pas ses yeux, elle les ignorait. Ils ne se parlaient pas mais dès les premières secondes, j'ai senti leur silence pesant. Ils ne parlaient pas, non pas parce qu'ils n'avaient rien à se dire, mais parce qu'ils ne voulaient rien se dire. Du moins, lui ou elle. Au début, je ne faisais pas trop attention à eux, j'étais trop occupée à regarder mes notifications sur facebook.

Et puis, j'ai senti la moiteur de ce silence, assourdissant, ces non-dits qui n'attendaient qu'à être délivrés, une bulle prête à crever au-dessus de leurs têtes. Témoin de tout ça, spectactrice de leur solitude respective, je ne faisais rien. Puis, le jeune homme avec une barbe de hipster (il avait également un sac en toile rouge) s'est approché de la jeune fille, chignon et lunette. L'air coincé, mais surtout l'air absent. Il lui disait des choses qu'elle n'entendait pas. Un moment, il a voulu brusquement se barrer de la rame, on était à La Motte-Picquet. Il a fait un bond en avant, son regard vide de sens en a soudain repris un en suivant la trajectoire de cet homme, qu'elle ne pouvait pas tout à fait détester d'ailleurs, pour s'inquiéter de savoir s'il allait vraiment descendre à cette foutue station qui ne signifiait rien pour lui, qui ne signifiait rien pour eux. Il l'a regardé, il lui a dit quelque chose, j'ai pas entendu, l'alarme des portes s'est déclenchée, ça a couvert le son de sa voix, mais je sais qu'elle lui a répondu un truc car je me trouvais à 40 cm de la scène. 

Et puis, c'est elle qui m'insupportait. Elle fixait un point de la rame comme si c'était la chose la plus excitante au monde, mais elle n'y était pas, elle était ailleurs. Cette attitude m'insupportait car le mec continuait à la fixer avec tristesse et en même temps, je la comprenais, putain je la comprenais tellement. Elle aussi, elle aurait peut-être voulu se barrer à La Motte-Picquet, et même avant, qui sait, à Javel-André Citroën par exemple (un des noms de stations de métro les plus bizarres de tout la ratp car ça ne va pas ensemble, c'est un peu comme si je te disais qu'une nana s'appelait Hortense-Julia). Oui, le mec la fixait avec une mélancolie douce, une tristesse brutale et tendre à la fois, du genre "On va encore continuer jusqu'à Gare d'Austerlitz comme ça ?". A moins que ce ne soit elle qui le lui ait dit.

Un moment donné, elle s'est assise sur un strapontin à côté du mien. Il tenait toujours la barre, à moins que ce ne soit elle qui le tenait. Ce trajet était moite, interminable. C'était à qui allait crever le silence en premier. Puis, il s'est penché vers elle, il lui a dit quelque chose à l'oreille que moi-même, à exactement 14,5 cm de moi, je ne pouvais pas entendre. Y avait même un autre mec à côté, debout, qui faisait genre d'envoyer un texto mais qui devait être tout aussi absorbé par la scène. La nana lui a demandé de répéter ce qu'il venait de lui dire à l'oreille, l'alarme des portes ayant encore couvert les mots. Il répéta ce qu'il avait dit, je ne sais pas ce qu'elle a répondu. Putain, mais ce silence, je ne le connaissais que trop bien. Moi aussi, j'aurais voulu le crever à l'époque avec une aiguille, un coup de pied, des hurlements, avec une épée magique. Ce trajet interminable aboutissant à une station pourrie. Mais ils devaient s'aimer putain, pour que le mec ne descende pas à la Motte-Picquet, et que la nana, même si elle faisait genre avec son regard de précieuse, l'a retenu en lui disant quelque chose. J'avais envie de me lever de mon siège dégueulasse et au mec, de lui dire : "Mec, tu ne peux pas la laisser." Et à la nana, de lui dire : "Sérieux, t'es conne. Et puis enlève ce chignon, ça te va pas." Et à eux, de leur dire : "Mais embrassez-vous, putain, je vous hais parce que vous pouvez vous sauver, il en est encore temps." Je les haïssais parce que moi, j'avais dû m'arrêter à La Motte-Picquet pour en être là où je suis aujourd'hui. 

Plus tard, ils sont descendus à Odéon.

J'étais toujours sur facebook.

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